Agence immobilière dégradée au Pays basque : amendes requises contre quatre militants d’Ostia
Fin 2022, quatre militants d’Ostia avaient déversé de la terre et de la paille dans une agence Bouygues immobilier pour protester contre le projet Marienia, à Cambo-les-Bains. Ils étaient jugés ce mardi 12 mars
Coude à coude. Du parvis du tribunal de Bayonne, jusqu’à la salle d’audience. Ce mardi 12 mars, les quatre militants d’Ostia jugés pour la dégradation d’une agence Bouygues immobilier ont été portés jusqu’à la barre. Plus de 150 soutiens se sont massés devant la juridiction. Il s’agissait de redire leur refus du projet immobilier Marienia, soutenu par la mairie, à Cambo-les-Bains. La même raison avait conduit au saccage de l’agence d’Anglet, le 17 décembre 2022.
Sur des photos et vidéos, on reconnaît les militants mis en cause coller des autocollants sur les murs ou les écrans, déverser de la paille et de la terre humide. Une maquette du projet de 94 logements, prévu sur des terres agricoles, a aussi été recouverte.
Pas de français
Devant le tribunal, les prévenus de 57 à 71 ans ne veulent s’exprimer qu’en basque. Ils restent silencieux, comme lors des gardes à vue. Trois témoins parlent pour eux. « Voir des citoyens s’engager pour défendre la terre nourricière me touche », explique Maryse Cachenaut. Cette agricultrice d’Itxassou a décrit au tribunal « le sentiment d’impuissance » du monde paysan « face aux 250 hectares de terre artificialisés chaque année » dans le département. « On juge quelques kilos de terre sur une maquette. À Cambo, c’est 3,7 hectares qui seront recouverts de béton et définitivement perdus. »
« On ne peut pas laisser Bouygues utiliser impunément son argent, son influence, pour faire taire des opposants », dénonce Martine Bouchet, militante du Cade. Après elle, Argitxu Hiriart-Urruty, élue d’opposition à Cambo, déroule dix ans de bataille « face à un mur ». « Alors que l’État nous donne raison avec la loi ZAN (zéro artificialisation nette des sols en 2050, NDLR), on cherche à criminaliser notre action. »
État de nécessité
Pour Me Antoine Beauquier, avocat de Bougygues, on est hors sujet. « Le tribunal n’a pas la charge de dire si ce projet est de qualité ou non. » Le tribunal administratif étudie encore les recours contre le permis de construire. « La terre nourricière est essentielle. Il n’empêche que les hommes ont aussi besoin de se loger. » Factures à l’appui, Me Beauquier demande « réparation à l’euro près ». 24 532 euros. « Je défends des gens qui font leur métier de promoteur. Ils habitent à Cambo, eux aussi. Ils sont parfois aussi Basques que les prévenus et veulent pouvoir travailler sans la peur au ventre. »
L’argument est repris par le parquet. « Les seuls qui savaient jusqu’où ils allaient aller, c’était les participants. Même en disant bonjour en arrivant et au revoir en partant, ils sortent du débat démocratique », explique Amandine Boyer. Elle requiert 1 000 euros d’amende dont 500 avec sursis pour chacun. Pour la défense, Me Alain Larrea avance « l’état de nécessité ». Cet argument juridique, déjà utilisé par les décrocheurs de portraits ou les antibassines, exonère de responsabilité une personne qui s’affranchit de la loi pour permettre d’éviter un danger imminent. Me Larrea invoque la nécessité de préserver « ces terres totalement plates, une denrée rare au Pays basque ». « L’artificialisation est un cancer qui nous ronge dont tous ces projets immobiliers sont les métastases. Ici, au détriment de zones agricoles. Ailleurs, de zones naturelles. » Délibéré le 14 mai.